Le patient et le corps médical


Aujourd’hui ça ne va pas, je ne trouve pas le sommeil à cause d’un petit « hic » entre moi et le corps médical de l’établissement où je me trouve.

Le contexte

Je suis rentré, le jeudi 13 juin 2019 dans un institut de rééducation et d’apparaillage afin de resortir avec une prothèse pour ma jambe droite.

Pour bénéficier de certains aménagements (piscine, balnéothérapie, etc) je suis obligé d’être hospitalisé en « hôpital de semaine » 1.

En arrivant, j’ai bien précisé que je ne voulais pas du régime diabétique et ce pour plusieurs raisons :

  • j’ai déjà été hospitalisé dans cet établissement, et le régime diabétique manque diablement de variété et est trop riche pour le peu d’activité physique pratiqué (en tout cas par moi) ;
  • je suis diabétique depuis 18 ans et je crois savoir gérer mon diabète et éloigner les aliments qui, dans une situation donnée (dictée par le taux de glycémie), risquerais de faire grimper ce taux ;
  • je suis insulino-dépendant, c’est-à-dire que pour réguler mon taux de glycémie, je prends de l’insuline.

Cette demande, argumentée, m’a été accordée, dès le premier repas.

Les faits

Hier soir, mardi 18 juin 2019, en me rendant au « restaurant » de l’institut, je constate que la place qui m’a été attribuée est vide. Pas de set de table, pas de petit pain, ni de verre et le chevalet qui porte mon nom à disparu.

J’apprends alors que j’ai été déménagé sur une table « diabétique ». Pourquoi ? Par qui ? Pour quelle raison ? Je n’en sais rien. Toujours est-il que je prends mes roues à mon cou et que je file dans ma chambre, prendre mes affaires et me dirige vers ma voiture.

Je suis interpellé par la directrice des soins qui me demande ce que je fais. Je lui raconte donc et l’informe de ma décision, au diable la prothèse, je n’ai pas envie de subir des changements dans mon traitement sans en avoir discuté avant.2

A force de discussions, elle me convainc de ne pas laisser tomber, en tout cas pas avant en avoir parlé avec les autres protagonistes de cette minuscule vaguelette3.

Je préviens mon épouse que je passe la voir et nous décidons de dîner ensemble, dans le restaurant sino-japonnais du quartier4 et je finis par rentrer dans l’établissement de soins.

Le problème

Il ne s’agit ici aucunement d’un changement important, et mon pronostic vital n’était pas engagé avant ce changement inopiné de régime. Hors la charte du patient dispose :

« L’information donnée au patient doit être accessible et loyale. La personne hospitalisée participe aux choix thérapeutiques qui la concernent. Elle peut se faire assister par une personne de confiance qu’elle choisit librement. »

Je répète qu’il n’y a rien de vital et d’important dans ce changement de régime alimentaire. Toutefois, l’amputation n’est pas un acte bénin, les suites psychologiques sont nombreuses et pas super fastoche à gérer, ni pour la personne concernée, ni pour son entourage. Ici, c’est me redonner l’impression que je ne suis pas capable de m’en sortir, qu’il me faut de l’aide pour savoir quoi manger, à nouveau me materner. Je sors un peu la tête de l’eau et paf on tente de me couler.

Dans le cas qui me préoccupe, c’est un bête changement de régime alimentaire. Nous avions convenu que je me démerdais avec mon pancréas et l’insuline.

C’est anodin, mais si un jour dans ce même établissement survenait sur ma personne un évènement grave, serais-je impliqué dans les décisions qui me concerne ? Ces décisions seront-elles respectées ? Un lien de confiance s’est brisé ce soir-là.

La suite

J’écris ce billet pendant l’insomnie qui a suivit cet épisode. Il est 5h30 du matin et normalement je dois voir l’équipe médicale ce matin pour discuter de ce problème. Mais j’ai la ferme intention de demander des éclaircissements sur TOUTES les prescriptions qui sont faites, dans quel but et qui en assura le suivit.

Ce matin

Je ne suis pas descendu prendre mon petit déjeuner. Je n’ai pas envie d’être face à un bol de café, avec des biscottes, du beurre et rien d’autre.

En revanche, dans la matinée j’ai croisé plusieurs personnes de l’équipe médicale qui toutes m’ont assuré ne pas être à l’origine du changement de régime, mais que le nécessaire avait été fait.

Effectivement, lors du repas du midi j’avais regagné une table de non-diabétique, une autre que la précédente. Mes voisin•e•s de tables n’ont pas l’air d’être très causant.

Pour les patients et leurs proches

Lisez attentivement la charte du patient hospitalisé, ne vous laissez pas faire. Prenez part aux décisions qui VOUS concernent et si quelque chose ne vous convient pas, dites-le, hurlez-le. Le corps médical cache sous sa blouse sa propre peur d’être à votre place.


  1. j’habite à 10Km de cet institut, je pourrais très bien rentrer chez moi tous les soirs. ↩︎

  2. c’est en fait ça mon VRAI problème dans cette affaire. ↩︎

  3. oui, j’ai un caractère de cochon et je démarre au quart de tour. ↩︎

  4. comme régime diabétique, le riz se pose un peu là. ↩︎

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